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Moi, je suis pour la crasse…Faut arrêter de tout nettoyer, karchériser, ravaler, astiquer, dégraisser, lessiver, décaper, récurer, toiletter, désinfecter… À force on enlève le beau, on enlève la vie.
Le beau c'est quand ça vieillit, quand on oublie dans un grenier, une cave, un jardin, dans la boue ou la poussière, au soleil, sous la pluie, à midi ou à minuit…
c'est quand on regarde ses mains pleines de terre et qu'on les essuie sur son froc, quand on a la barbe, les cheveux et les lunettes couverts de poussière et quand on se mouche dans un mouchoir blanc…
c'est quand les sabots pataugent dans la terre molle parmi les déchets, les épluchures et quand on traîne des morceaux de ronces en marchant sur un chemin au milieu d'une forêt ombrageuse…
c'est quand on invoque le "nom de dieu" parce qu'on a trébuché sur un bout de bois ou cogné ses orteils contre un caillou…
c'est quand on embrasse un immense tas de feuilles, qu'on les soulève à pleine brassée et qu'on les relâche dans le vent…
c'est quand on ramasse tout ce qui nous tombe sous la main : des bouteilles, des assiettes cassées, des couvercles de lessiveuse, des portes de chiotte, des bouts de bois accrochés au contrevent… pour en faire des figures aux yeux oranges, des bonjours du pays des rêves ou des faiseurs de laissés pour compte…
c'est quand on utilise le temps qui nous reste pour lui tordre le cou.
(texte écrit après la visite de l'expo Chaissac Dubuffet au musée de l'abbaye Ste Croix des Sables d'Olonne)
Version audio :
Chant diphonique
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pie lippue
lipe élu
pile et plu
épi lui
ile et pli
nuée
sous la pluie
nu
floc floc
et flic
vite
on fuit.
Version audio :
Extrait de "Moment musical n°3 de Schubert, Ingrid Haebler au piano
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L'ultime goutte
a fait déborder la vase
de l'ile
et l'oiseau s'est évaporé
dans la vague.
Version audio :
Extrait de "remembrance" de Dan Gibson
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Sur le pare brise elle se dandine
Nos yeux fascinés en suivent les cascades
et, comme nous, le paysage se trouble.
Version audio :
Extrait de "Remembrance" de Dan Gibson
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Un jour j'écrirai un poème qui aura pour titre :
pourtant
ou il n'y a personne
… peu importe
Je naviguerai sur des rêves d'océan
avec des mots oubliés
dans des petits matins gris.
Je verrai tes yeux perçants
et ton sourire gêné, gauche, ou secret
qui voudrait faire peur
mais à qui ?
Je croiserai ton regard
gommé derrière d'autres regards étrangers
assis les uns en face des autres
jusqu'au prochain arrêt.
J'entendrai les notes d'une musique éclatée
symphonie invisible pour mer en furie
avant le grand silence blanc au bord de la falaise.
Je naviguerai sur un bateau
rempli de souvenirs
au plus près de mes rivages.
Je resterai sans bouger
j'attendrai que tout continue longtemps
avec ce vent léger posé sur ma tête
couverte de mousse.
Un jour j'écrirai un poème
et je remplirai le ciel de visages
pendant des heures.
Rien ne pourra m'arriver.
Pour accompagenr la lecture :
Extrait de "L'estran, suite 1" de Didier Squiban (L'estran, L'Oz production)
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Rien n'a changé, rien, et pourtant ça tourne, partout, dans tous les sens, à donner la viroune, à faire péter les planètes;
triste valse insensée et folle, folle.
Rien ne change, rien n'a changé, on tourne en rond comme disque sur platine sans émettre la moindre musique, le plus petit son, juste un petit gratouillis au creux de l'oreille.
Pas possible de s'arrêter, débrancher, faire sauter les centrales électriques, vider les batteries au lithium ou alcalines piles ou faces … Impossible. !
Toujours l'énergie du soleil, de l'eau, du vent, du pétrole, du jus de n'importe quoi
et quand ça ne suffit pas on invente autre chose même de l'énergie intérieure avec son corps, son cœur, son cul pourquoi pas,
faut que ça court, que ça course folle, se ressourcer, se nourrir, se mourir pour que ça marche encore, que ça tourneboule…
Tant pis si ça retombe partout, fatigué de la casquette, mou du chapeau, tant pis si ça s'écrase sur les bas flancs, si ça crie, couine, pleure et gueule à fendre l'âne Martin, pauvre misère !
Toujours la course, ça engrange pour dégranger, ça accumule pour exploser, ça remplit pour dégouliner dessus, dessous, partout ça déborde ;
on s'en fiche pourvu que ça tourne !
Toujours la même musique qui fait la sourde oreille, tant pis tympan tout fou tout fout le camp par tous les bouts…
mais ça ballotte, ça s'agite, ça gigote, ça branle et ça gesticule comment veux-tu….
Important, nécessaire, indispensable tout ce remue ménage démentiel d'orage.
Malheur à ceux qui s'immobilisent, se retournent pour voir, pour réfléchir ou juste pour attendre.
Malheur !
Surtout pas s’allonger dans l'herbe tendre pour lécher quelques gouttes de rosée dans un soleil matinal.
NON ! écrasés, écrabouillés, chair à pâtés ou à canons, transformés en énergie soleil vert ou bleu pour que ça tourne encore plus vite, encore plus longtemps…
Faire croire que rien jamais ne va changer, que tout continuera à tourner vite, vite, encore…
Alors, la poésie ?
Non, pas possible, il faudrait pouvoir, vouloir s'arrêter le temps de regarder un peu en arrière voir Sodome ou Gomorrhe sans craindre la divine et farouche colère des biens pensants des mieux disants,
faudrait le temps de respirer, goûter, caresser, sourire, pleurer deux ou trois larmes devant un homme, une femme, un enfant ou même un chien qui se seraient eux aussi arrêtés .
Et on s'en foutrait comme de notre première chemise de sentir à côté de nous passer le vent de la folie.
Peut-être que quelques autres nous rejoindraient. Oui, peut-être.
Alors, la poésie, sans doute.
On pourrait boire beaucoup de choses de ce monde, pour éviter de nous dessécher.
Peut-être.
Faudrait voir, faudrait avoir le courage d'essayer.
Version audio :
Extrait de "Assinaina" de Tartit (Abacabok)
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On sent bien qu'il y a des choses qui partent
ou qui passent
au bout d'une rue
d'une vie
des choses qui vont
toujours dans le même sens
et qu'on ne revoit jamais.
Les larmes coulent
on en connait le sel
et l'amertume
les traces chiffonnées
sur les mouchoirs en papier.
Et pourtant, ce matin derrière la fenêtre
le brouillard et le soleil
les arbres et le vent
le chant des tourterelles
et le silence du ciel.
Nous avions le cœur bien au chaud
dans cette lumière là.
Alors, qu'est-ce qui nous fait peur
accoster sur une autre rive
se reposer dans une espérance
infinie
?
Nous ne sommes pas seuls
non
nous sommes des multitudes
à trainer nos pas
dans la poussière de nos ancêtres
notre poussière
à semer nos larmes
sur le chemin.
Nous ne sommes pas seuls
à planter nos regards
dans le temps qui passe.
Et pourtant.
Pour accompagner la lecture :
I remember - Jimmy Yancey
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Cueillir au fond des poches
le silence d'un jardin secret
et une pluie de feuilles mortes
dans le vent de novembre
avec noisettes et châtaignes,
aux couleurs de la vie.
Pour accompagner la lecture :
"No bold villain" - Timber timbre
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Dans un coin noir de mon enfance
il y a le chemin du village
en revenant de l'école
un peu plus tard que d'habitude
le soir enveloppait les arbres
et les faisait marcher derrière nous
presque sans bruit
juste derrière nous.
Version audio :
Extrait de Funérailles de Liszt - Piano Julius Katchen (Decca)
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